Another Day of Life

de Raul de la Fuente et Damian Nenow



International, 2017, 1h26
avec Ryszard Kapuscinski, Akie Kotabe, Wilson Benedito

Another Day of Life

Varsovie, 1975. Ryszard Kapuscinski (43 ans) est un brillant journaliste, chevronné et idéaliste. C’est un fervent défenseur des causes perdues et des révolutions. À l’agence de presse polonaise, il convainc ses supérieurs de l’envoyer en Angola. Le pays bascule dans une guerre civile sanglante à l’aube de son indépendance. Kapuscinski s’embarque alors dans un voyage suicidaire au cœur du conflit. Il assiste une fois de plus à la dure réalité de la guerre et se découvre un sentiment d’impuissance. L’Angola le changera à jamais : parti journaliste de Pologne, il en revient écrivain.
 

Difficile de traduire la « confusão » portugaise. Mélange, chaos, amalgame, instabilité… Et cependant, c’est cet état de l’entre-deux, cette suspension du monde, qui exprime au mieux le geste de Raúl de la Fuente et Damian Nenow dans Another Day of Life.

Une question identique taraude Ryszard Kapuściński, reporter de guerre polonais dans l’Angola de 1975, et les deux cinéastes : comment figurer l’entre-deux ? Comment représenter le chaos créateur d’une indépendance ? la (re)mise en ordre du monde après le régime colonial et l’ingérence de l’Afrique du Sud voisine ?

En faisant l’hybridité un principe constitutif. Hybridité formelle. Another Day of Life mêle images animées (pour les deux tiers), racontant l’expédition de Kapuściński vers l’inaccessible front sud, et prises de vue réelles (un tiers du film) dans les rues de Luanda aujourd’hui. Hybridité narrative : le passé du reportage et le présent de l’Angola s’entrelacent, se répondent, et mettent en perspective les espoirs (déçus ?) suscités par l’arrivée du MPLA au pouvoir à l’heure de l’indépendance. Hybridité de la vérité : s’entremêlent images de fiction destinées à reconstruire une époque et témoignages documentaires des protagonistes encore en vie.

Face à une telle hybridation des strates, il faut les penser de façon synthétique. Animation et prises de vue réelles ne s’opposent pas, mais co-construisent la représentation de l’Angola ; passé et présent tracent l’histoire de ce pays depuis sa révolution ; et fiction et documentaire travaillent de concert pour faire émerger des vérités d’un conflit et de héros oubliés.

Maxime Lerolle, Lebleudumiroir.fr



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